Malades, sachons les aimer mieux...

Publié le par Weber Michaël

 

Les lecteurs avertis de mon blog, savent qu’il m’arrive parfois de livrer un sentiment plus personnel, or cette fête de la Toussaint et quelques moments passés en famille m’ont inspiré…

Je pourrai parler de ma grand-mère maternelle, à qui j’étais tellement attaché, et qui nous a quittés en 1998. Mais un article ne suffirait pas à dire comment je l’admirais, elle qui fut contrainte à élever ses enfants seule, alors que son mari décéda en 1945 à l’âge de 35 ans d’un accident vasculaire cérébral… L’aînée des filles, ma mère, avait 9 ans, la seconde 6 mois. Je parlerai plus longuement de cette vie, vue par le petit-fils que je suis, vie avec ses douleurs, ses limites, ses joies, ses espérances…

 

Aujourd’hui c’est de tout autre chose que je veux parler. A l’occasion de la fête des Saints, et celle des Morts, le 2 novembre, chacun pense à ses parents proches, ceux qui l’ont quitté. Chacun fait un effort supplémentaire pour se souvenir de ces moments passés ensemble. Mais chacun s’inquiète aussi et se demande ce que va lui réserver l’année à venir. Serons-nous aussi touchés par le malheur, qui dans ma famille souffre, qui est touché par la maladie. La Toussaint n’est pas la fête des morts, mais c’est celle d’un espoir. Dans la tradition chrétienne d’abord, l’espoir d’un au-delà où se retrouvent tous les croyants. Pour ceux qui restent, l’occasion de renouer les liens de familles, de se souvenir que c’est dans la famille que se trouve le réconfort quand un être nous quitte.

 

Or, voilà que vendredi dernier nous vivions un de ces moments forts en famille. Mon père se rapproche de ses 79 ans qu’il aura en décembre prochain. Pour ceux qui le connaissent, ils ont de lui le souvenir d’un grand bricoleur qui suscitait l’admiration de ses amis, aussi de ses enfants jusqu’au complexe. Ils voient aussi en lui le grand cyclotouriste pour qui aucune route de la région n’a de secret, celui qui a été reconnu officiellement par la fédération française de cyclotourisme pour les nombreux brevets cyclotouristes qu’il a validés. Il est aussi celui qui a progressé dans son entreprise, aux HBL, pour gravir tous les échelons et se retrouver chef d’atelier de Marienau.

 

Un des premiers à partir en congé charbonnier a bien profité de sa retraite, a aidé les autres, ses enfants dans leurs maisons à construire ou à rénover, mais aussi ses frères et sœurs, sans oublier de se faire plaisir sur son vélo. Mais voilà… En 2009, un premier coup de semonce, son cœur demandait du repos, son dos le faisait de plus en plus souffrir et il dû passer quelques jours à l’hôpital. Celui qui n’avait jamais été malade de sa vie, qui ne s’est jamais plaint allait devant d’autres problèmes de santé. On le voyait se promener constamment avec une main dans la poche, à table une main retenait la seconde, puis des tremblements sont apparus, pour finir par le diagnostic, la maladie de Parkinson, la même qui avait touché son père…  A suivi le doute, l’inquiétude de devenir dépendant, la crainte de ne plus être utile, de devoir limiter ses activités. Et de fait, depuis, quelques actes courants de la vie deviennent plus difficiles et source d’inquiétudes.

 

Les enfants que nous sommes, sont inquiets. Et pourtant face à cette épreuve, la famille a tendance  à se souder, a faire corps autour de ce père, devenu soudain plus tendre, plus sensible, plus humain sans doute…  Bien sûr qu’il était malheureux vendredi matin à être réduit à faire appel à quelqu’un pour couper son bois pour l’hiver, et comme il ne se résout jamais à accepter son état, il se fera un devoir de pousser la brouette devenue trop lourde ou à entasser le bois… Mais quelle joie pour lui, joie du regard à voir aussi prêt de lui sa fille Rachel, son fils et son petit-fils François. Et, enfin, quelle joie pour nous de lui faire ce plaisir-là, de le rassurer, d’être à son écoute, de le considérer avec sa maladie plus encore comme notre père, de l’aimer mieux.

 

Bien sûr que nous voudrions le voir au meilleur de sa forme comme nous l’avons toujours connu, néanmoins nous essayons de tirer des leçons de cette épreuve. La première, la solidarité nécessaire avec nos parents, ils étaient là quand bébé nous étions malades, nous devons être là autant que possible maintenant qu’ils sont usés de nous avoir trop donné. La seconde, c’est que les sentiments s’expriment à tout âge, et en toutes circonstances, la maladie nous oblige à regarder l’autre différemment, avec plus d’attention, en se mettant à son écoute. Il est tellement difficile de lui faire comprendre que la vie vaut la peine d’être vécue même avec sa maladie, et qu’à nos yeux il n’est pas un autre, au contraire, il nous montre une facette de sa personnalité qu’on ne soupçonnait pas. Et finalement, dans une famille qui ne s’extériorise pas, le plus difficile pour nous c’est de lui dire qu’on l’aime, lui dire comme un enfant avec les mots, en allant directement à son cœur. Enfin, la dernière leçon, c’est la nécessité permanente de le rassurer. Le roc qu’il a été est inquiet de son devenir, comme il le dit, il a peur de « mourir comme mon père », qu’il a assisté jusqu’au dernier souffle dans sa chambre d’hôpital.

 

Personne ne parle de cette issue fatale, car comme dans toute maladie on repousse l’inacceptable, l’inconcevable. J’ai été aux côtés de nombreuses familles endeuillées, notamment par mon mandat d’élu, et on se sent finalement toujours si petit, si inutile. J’ai cherché les bons mots, et on ne les trouve pas toujours, mais reprend bien volontiers aujourd’hui les mots de Robert Hainard : « comme après une journée bien remplie donne joie à dormir, une vie bien remplie donne joie à mourir ».

 

Alors, à l’occasion de cette fête de la Toussaint, sachons nous souvenir de ceux qui nous manquent, mais sachons aussi dire à ceux qui nous entourent combien ils nous sont chers…

 

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L
<br /> <br /> Salut Mickaël,<br /> <br /> <br /> Ce que tu écris ne laisse pas indifférent. Ton texte appelle à re-venir vers les êtres qui nous sont proches, qu'ils soient encore vivants ou qu'ils nous aient malheureusement déjà quittés.<br /> <br /> <br /> Il attire aussi notre regard sur cet horizon dont nous nous rapprochons plus ou moins vite, mais toujours avec l'espoir de garder prise sur notre destin.<br /> <br /> <br /> La présence, le soutien et l'affection des proches seront alors les meilleurs garants pour vivre dans la dignité la dernière heure de la dernière journée.<br /> <br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> <br /> <br />
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R
<br /> <br /> Ce qui nous prouve encore une fois qu'il n'est jamais trop tard , pour dire aux gens qu'on aime , qu'on les aime .Bravo Michaël , beaucoup d'émotion pour moi aussi , et de souvenirs d'enfance<br /> auprès de mon parrain et Suzanne.<br /> <br /> <br /> Marie-Jos<br /> <br /> <br /> <br />
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